mardi 14 octobre 2008

La SNCF et ses bornes damnées

Je suis tributaire de la SNCF sur les longues distances, tout simplement parce que soit disant que je prenais les virages sur deux roues en voiture ! N'importe quoi, je maîtrisais parfaitement la situation : je pouvais même prendre les virages sur deux rouges, avec une main sur le volant et une autre me massant la nuque ! C'est dire ma dextérité.

Malheureusement, ils n'ont pas voulu me donner mon permis (ça fait de cela quelques années), les couards!
Bref, vexée, je prends le train.

J'aime bien sauf quand il y a des gens qui sentent mauvais ou qui s'endorment sur mon épaule. Ou quand il y a des jeunes gens qui mettent de la tecktonik au volume maximum. Ou quand il y a des gens qui racontent leur vie intime au téléphone (Nooooon je ne veux pas savoir si elle porte une petite culotte!). Ou quand des profs corrigent leurs copies et les étalent partout, même sur mon emplacement à moi, sous principe qu'ils ont du travail et que ça me dérange pas. Hein, ça ne vous dérange pas mademoiselle? Ben non voyons, je ne voudrais pas m'opposer au dur labeur d'un honnête dispenseur de savoir.

La SNCF a mis en place des guichets aux horaires réduits de façon assez ubuesques : genre 10h05 - 11h50 / 14h30 - 15h55. MAIS la SNCF a aussi installé des bornes. Youpi.

Vous savez, ces bornes jaunes qui pullulent dans les gares : c'est pratique, et puis depuis le temps, on a pris l'habitude de parler aux machines. Moi-même, il m'arrive de les supplier d'arrêter d'émettre un bip sonore retentissant dans toute la gare quand je dois composer mon code bancaire!

Dimanche, entre deux muffins et trois épisodes de séries télé, je suis allée jusqu'à la gare pour changer mon billet TGV, par pure convenance personnelle.

J'insère mon billet, je clique sur "échange", ça me valide l'opération, je trouve ça fantastique, je me délecte des nouvelles technologies et admire l'architecture de la gare en sifflotant, lorsqu'apparaît sur l'écran un message aussi étrange qu'inattendu : "erreur imprimante, veuillez vous rendre au guichet avec le reçu suivant".

Ce qui était drôle, c'est qu'il n'y avait pas de guichet TGV ouvert, ni de reçu émis. Ni de billet TGV d'ailleurs. J'ai donc couru jusqu'au guichet "billets Ile de France" et la seule chose qui est sortie de ma bouche stupéfaite est : " oh, la machine a mangé mon billet !". Le type a entrouvert les yeux en etouffant un baillement et s'est levé de sa chaise.

S'en est suivi une heure de démontage de la machine, farfouillage dans l'imprimante, jusqu'à ce qu'une dame de la SNCF qui restait les mains sur les hanches à regarder son collègue bricoler, se tourne vers moi pour me dire d'un air courroucé : "ah non mais franchement, ces gens qui utilisent les bornes SNCF et qui se plaignent après que ça marche pas ! Vous auriez été au guichet, on vous l'aurait fait votre échange!".

J'avoue, je me suis énervée. Une vague de colère et d'indignation est montée en moi contre cette femme incompétente et arrogante qui ne fout rien de sa journée (vu que la gare était en travaux et qu'aucun train ne circulait, il n'y avait personne à qui donner des renseignements), et qui venait me dire, à moi, cliente de la SNCF, que j'étais en tord parce que j'avais utilisé une borne de la SNCF !

Je crois qu'on a atteint le fond de la bêtise humaine. Je lui ai crié dessus que j'étais dans mon droit d'utiliser une machine SNCF - TGV d'autant plus que je n'avais pas le choix vu que le guichet TGV était fermé et que si je m'étais présentée au guichet Ile de France, elle m'aurait envoyée bouler.

Mais surtout, la SNCF est responsable du bon fonctionnement de ses bornes : elle laisse le choix au client entre borne et guichet (et pas le choix quand il n'y a pas de guichet ouvert), c'est à elle d'en assumer les conséquences. Pas à moi.

Là, elle a fui avec ses petites jambes potelées et son courroux inapproprié.

Le type de la SNCF avait basculé tête la première dans la machine que je bouillais encore d'indignation, les bras croisés et les lèvres pincées.

Finalement, il m'a dit : j'appelle l'autre gare, allez-y, le guichet TGV est ouvert, ils vont vous refaire un billet. Bon. 15 minutes de marche, j'appelle Bien-Aimé, je lui raconte, il rigole (finalement c'est drôle l'idée de dire à un client que les bornes SNCF c'est pas de la responsabilité de la SNCF).

Arrivée à l'autre gare, le guichet TGV était fermé. Une guichetière me dit encore : "ohlala vous avez utilisé une borne?" comme si c'était un truc incroyable qu'ils ne maîtrisaient pas du tout.
J'avais l'impression qu'elle allait me dire : "ohlala les bornes vous savez, on ne sait pas d'où elles viennent, un jour elles sont apparues dans la gare et depuis on n'a que des problèmes, faut pas les utiliser, on ne sait pas qui les a installées".

J'ai même pas crié. Toute la fureur de mon cerveau est descendue dans mes yeux et a crispé mon visage entier. J'ai eu l'impression que les yeux devenaient noirs, comme dans les films de science-fiction. Soudain, un type a jeté une pièce et a balancé à la guichetière (alors que j'étais en grande discussion houleuse avec elle) : "c'est pour faire de la monnaie pour les toilettes!".

Je me suis redressée de toute ma taille (et je fais 1,80 m) et j'ai lentement tourné la tête vers l'insolent. C'était vraiment pas le moment de me doubler et de m'interrompre surtout pour une histoire de vessie. Je n'ai rien dit, il a filé. L'affreuse guichetière a vite arrêté de ricaner avec sa collègue et j'ai demandé à ce qu'elle trouve une solution rapidement.

Elle a marmonné un truc, et a appelé la "responsable", qui est arrivée avec un petit calot bleu perché sur un brushing des années 80, ce qui m'a instantanément déridé.
J'ai dû racheter un billet et je me suis assurée que le billet "avalé" par la Borne-De-La-Mort-Qui-Tue me serait remboursé.

Lundi matin, l'Empereur, sa femme et le P'tit prince, sont venus chez moi, pour me serrer la pince...

Lundi matin donc, à 9h15 précisément, je reviens à la gare et je demande le remboursement de mon billet avalé et vite, parce que j'avais mon TGV à prendre.
Curieusement, les guichetiers du lundi sont plus réceptifs que ceux du dimanche. Plus polis aussi, plus efficaces, plus professionnels. Surtout, ils ne nient pas que les bornes SNCF appartiennent à la SNCF.

Bref, j'ai reçu mon nouveau billet ce matin.
Je retiens quand même la grosse dame avec ses mains sur les hanches : "Vous utilisez une borne SNCF et après vous vous plaignez qu'elle ne fonctionne pas!".
C'est très drôle. Je n'aurai jamais pensé à dire un truc pareil.

C'est comme une banque qui a une borne de retrait automatique : la borne ne vous délivre pas l'argent, vous vous en plaignez au guichetier qui vous répond : "mais mon Dieu, vous avez utilisé une borne, malheureuse? nous on ne répond pas des bornes, on ne les connaît pas, on n'est pas responsable!".

On devrait faire un recueil des répliques cultes des guichetiers de la SNCF.

Votre dévouée, aux yeux noirs de fureur. AHAHAHAHAH -> rire diabolique.

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